Article de Delphine Veissiere
Photographie de la Maison Laurent-Perrier
Lorsque l’on lit Stevenson il est impossible de passer à côté de cette fameuse citation : « Wine is bottled poetry ». Ni même d’oublier l’exaltation de Charles Baudelaire, dans les fleurs du mal, lorsqu’il goûte au vin enchanteur et qu’il savoure le moment. « Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles ». Le moment, c’est celui de l’attente du printemps, de ses verdeurs et du chant poétique des oiseaux qui invitent à la poésie et au réveil des sens. Quoi de mieux qu’un verre de bon vin, frais et gouleyant qui vous invite à l’abandon et au plaisir. Celui d’un parfum caché qui s’exprime dans la fraicheur d’une cave ou d’un chai. Champagne, Prosecco ou vin tout court sans perlage ni mouvement zélé d’une bulle isolée dans un verre trop grand ?
Hier encore, j’ai entendu que le champagne n’était pas du vin mais du champagne ! Étrange incohérence pour un vin blanc ou rosé aux deux fermentations et dosage de rigueur pour conserver son équilibre et lui donner du corps. Mais est-ce cela un vin printanier ? Non bien sûr. Le vin printanier est celui qui par sa fraicheur et son authenticité vous intrigue et vous met en déséquilibre par rapport à vos certitudes.
La sucrosité est inutile et ne conforte que les buveurs de vin n’ayant pas les papilles prêtes à gouter de nouveaux nectarsnés de la patience de l’homme et de l’affinage en cave.
Pas dosé ou non dosé, blanc ou rosé, le champagne nature ne s’habille pas d’artifices. Il révèle l’âme de son créateur et la maitrise des expressions aromatiques et gustatives du nectar. Il se révèle avec l’association de plats crus alliant les coquillages, carpaccio et légumes crus aux saveurs ténues et discrètes. Les mets iodés exaltent sa minéralité franche et parfois végétale qui titille le bout de la langue et invite à une dégustation passive et contemplative d’une nature qui se réveille avec les premiers rayons de soleil dorés. Sa couleur est moins intense et ses senteurs épurées et caractéristiques du terroir dont il provient. Il goûte bien à l’entrée du repas et sur une cuisine brute.
La cuvée Grand Siècle Brut nature de la maison Laurent-Perrier fait partie de ces nectars rares et techniquement irréprochables qui font vibrer le palais et ravisse les convives d’une partie de campagne ou d’un brunch en terrasse dans quelques palaces parisiens. Il se déguste frais et de préférence en format magnum afin de savourer son extraordinaire persistance et longueur en bouche. Ce champagne est tout en équilibre malgré des origines vigneronnes qui ne présagent pas. Il s’agit en effet d’une grande maison qui ne peut être classifiée comme un vigneron de niche.
Sa force réside dans son style et sa qualité constante. Il n’est pas rare de l’identifier à l’aveugle. Il s’agit d’un champagne racé mais non prétentieux qui traverse les années sans se contredire. Il est le vin idéal pour une table joyeuse, printanière et conviviale.